Laiterie de Coaticook: la crème du succès

L’histoire de Jean Provencher

Mardi 7 mai 2019
En 2020, la Laiterie de Coaticook célébrera ses 80 ans d’existence, un exploit en soi dans l'industrie laitière, bouleversée par de nombreuses révolutions. Jean Provencher a repris les rênes de l’entreprise avec sa sœur en 1989 et a accéléré sa croissance en misant sur la crème glacée.

Du lavage des caisses à lait à la distribution des bâtonnets de sucettes glacées en passant par le balayage dans l’usine, Jean Provencher a commencé à travailler à la Laiterie de Coaticook avec son père alors qu’il n’avait qu’une dizaine d’années. Ce dernier avait racheté l’entreprise avec son associé Fernand Houle en 1976.

Cette reprise des mains d’un regroupement d’investisseurs de Coaticook a aussi sonné la fin de la distribution du lait, du lait au chocolat et de la crème, tous des produits qui dataient de la fondation de l’entreprise, en 1940.

Les activités se sont alors concentrées principalement sur la fabrication de la crème glacée et du fromage cheddar. « Laiterie de Coaticook était un peu leur emploi secondaire : mon père avait aussi son entreprise de construction, et son associé, son entreprise de restauration, explique Jean Provencher. Leur défi à eux a consisté à rendre l’entreprise rentable, mais ils ne voulaient pas la faire croître davantage. » 

Au fil des années, Jean et sa sœur, Joanne Provencher, ont souhaité pousser plus loin le modèle d’affaires de l’entreprise. C’est en 1989 qu’ils ont officiellement racheté la Laiterie de Coaticook, qu’ils ont eu à la valeur marchande.

« Nous dirigions et contrôlions déjà l’entreprise en grande partie, sans toutefois avoir accès aux budgets et aux profits, souligne-t-il. Lorsqu’on a eu ceux-ci entre nos mains, nous avons pu réfléchir à comment les investir pour faire grandir l’entreprise. »

Jean Provencher

Un camion et des centaines de nouvelles routes

L’achat d’un nouveau camion de crème glacée a été la première grande décision qu’ils ont eu à prendre. « Cela allait gruger 50 % de nos profits, mais on n’avait pas le choix si on voulait réussir à développer de nouvelles routes de crème glacée », précise-t-il. 

Et le choix de se tourner vers la crème glacée lui semblait la bonne avenue à emprunter plutôt que celle du fromage, qui représentait pourtant 80 % du chiffre d’affaires à l’époque. « Le développement du secteur des fromageries a explosé dans les années 1980, si bien que ça devenait dur de trouver de nouvelles parts de marché, accaparées par tous les autres petits acteurs indépendants qui étaient nés », explique-t-il. 

Chaque vendredi matin, Jean Provencher partait à bord de son camion et distribuait ses produits glacés à la fromagerie Côté de Warwick, qui détenait un bar laitier. Sur la route du retour, il arrêtait partout où il pouvait pour laisser des échantillons. « Ma stratégie, c’était de faire goûter d’abord afin que les marchands s’aperçoivent de la différence de goût et de qualité, puis de discuter par la suite, s’ils avaient aimé et en avaient besoin. »

Un autre jalon important de sa croissance a reposé sur la production de crème glacée pour d’autres marques privées, qui, elles, s’occupaient de la mise en marché. C’était le cas de Lamothe, à Drummondville. « Sauf que les ventes de cette crème glacée se portaient tellement bien que j’ai dû protéger ma marque pour m’assurer de ne pas perdre 50 % de mon chiffre d’affaires si l’entreprise décidait d’en produire elle-même, précise-t-il. Je devais continuer à développer la marque Laiterie de Coaticook ailleurs. »

Il a donc tourné son regard vers le Saguenay-Lac-Saint-Jean, où il a approché Nutrinor, qui lui a passé une commande de 20 000 bûches de Noël. « On n’avait jamais fait ça, mais ça s’est bien déroulé et l’entreprise nous a assuré un marché qui durerait deux mois par année, ajoute-t-il. De fil en aiguille, la production de bûches a ouvert la porte à une distribution provinciale par laquelle j’ai pu me familiariser avec les acteurs de ce domaine. Avec la popularité de la bûche, on nous a demandé si on faisait aussi de la crème glacée, et ainsi s’est développé notre marque : de bouche à oreille. » 

Une stratégie marketing sur laquelle compte toujours Jean Provencher, n’ayant pas modifié le contenant transparent d’origine. « On s’est souvent fait dire qu’il avait l’air cheapette, mais je n’avais pas les budgets pour suivre les concurrents qui changeaient l’image de leurs marques tous les ans, dit-il humblement. Je me suis dit que les consommateurs allaient pouvoir y voir le produit et qu’ils goûteraient à la différence. »

La crème glacée représente maintenant 80 % du chiffre d’affaires et le fromage, 20 %. « On offre encore un volume intéressant de cheddar, mais j’ai décidé de vendre uniquement sur le plan régional plutôt que de mettre des efforts sur son développement à l’échelle provinciale. »

Passer la crème glacée au suivant

C’est maintenant au tour de Jean Provencher de passer le flambeau. Les cinq prochaines années seront consacrées à former sa relève, c’est-à-dire ses quatre filles, âgées de 24 à 29 ans.

« On leur a fait passer des évaluations pour déterminer leurs forces et leurs faiblesses », mentionne-t-il. Une fois par semaine, elles se réunissent pour apprendre les rudiments du métier, du fonctionnement de l’usine à l’administration. « Pendant les deux premières années, elles cumuleront de l’information, puis les années suivantes, on vise à ce qu’elles forment le comité consultatif de l’entreprise pour enfin devenir le comité décisionnel. »

L’entreprise en chiffres

80 : le nombre de bougies que soufflera l’entreprise en 2020.
4 : le nombre de filles de Jean Provencher qui prendront la relève de l’entreprise dans un horizon de cinq ans.
80 : le pourcentage que représente le chiffre d’affaires de la crème glacée
4 : l’augmentation de plus du quadruple des ventes de 2004 à 2013 qui a entraîné l’agrandissement des installations de la Laiterie de Coaticook.

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